Droit des marques : nouveau cadre.

Droit des marques : nouveau cadre.

L’ordonnance n°2019-1169 du 13 novembre 2019 relative aux marques de produits ou de services (ci-après, l’Ordonnance) est venue parfaire la transposition en droit français de la directive (UE) 2015/2436 du 16 décembre 2015. L’Ordonnance est entrée en vigueur le 11 décembre dernier concomitamment au décret d’application n°2019-1316 du 9 décembre 2019 relatif aux marques de produits ou de services. Ce dernier précise les modalités d’application de certaines dispositions de l’Ordonnance.

Ces textes modifient en profondeur le droit des marques et le Code de la propriété intellectuelle, notamment sur les points suivants :

Procédure d’opposition

L’ordonnance modifie la procédure d’opposition devant l’Institut national de la propriété intellectuelle (INPI).

De nouveaux droits antérieurs sont invocables dans le cadre d’une procédure d’opposition.

Le nouvel article L.712-4 du Code de la propriété intellectuelle établit une liste de droits antérieurs permettant à un titulaire de fonder une opposition à enregistrement d’une demande de marque. La procédure d’opposition n’est plus seulement permise aux titulaires de marques antérieures.
Les titulaires de dénominations sociales, noms commerciaux, enseignes et noms de domaine antérieurs peuvent désormais faire opposition à l’enregistrement d’une marque.

Dans le cadre d’un dépôt de marque, nous recommandons d’effectuer une recherche d’antériorités approfondie afin de connaître l’ensemble des antériorités, c’est-à-dire non seulement les marques antérieures mais également les dénominations sociales, noms commerciaux et noms de domaines antérieurs et ainsi limiter les risques d’opposition à l’enregistrement.
Nous recommandons par ailleurs aux titulaires de marques de mettre en place une veille des demandes de dépôts de marques similaires ou identiques à leurs signes.

L’Ordonnance modifie la procédure d’opposition devant l’INPI.

Le délai d’opposition reste de deux mois à compter de la publication de la demande de marque faisant l’objet de l’opposition au BOPI (Bulletin Officiel de la Propriété Industrielle). Toutefois, il est instauré un délai supplémentaire d’un mois suivant l’expiration de ce délai de deux mois pour communiquer à l’INPI l’argumentation à l’appui de l’opposition (exposé des moyens et pièces) (article R.712-14 du Code de la propriété intellectuelle).
En pratique, cela laisse plus de temps au déposant pour préparer le mémoire à l’appui de sa demande d’opposition.
Enfin, l’Ordonnance introduit l’obligation pour l’opposant de prouver un usage de la marque pour tous les produits et services servant de base à l’opposition s’il s’agit d’une marque antérieure enregistrée depuis plus de cinq ans, ou de justifier l’existence de justes motifs pour le non-usage (article L. 712-5-1 du Code de la propriété intellectuelle). Si l’opposant ne peut justifier d’un usage sérieux de ladite marque ou de justes motifs de non-usage, l’opposition fondée sur une marque antérieure enregistrée depuis plus de cinq ans sera rejetée.

Une fois la marque enregistrée, nous vous recommandons de documenter l’usage de la marque pour les différents produits et services pour lesquels la marque est enregistrée afin d’obtenir des éléments de preuve de cet usage, ou le cas échéant du non-usage, dans l’hypothèse de contentieux ultérieurs devant l’INPI ou les tribunaux judiciaires (anciennement Tribunal de grande instance).

Nouvelles actions devant l’INPI

De nouvelles actions peuvent être effectuées devant l’INPI : les procédures en nullité ou en déchéance de la marque seront de la compétence exclusive de l’INPI lorsqu’elles sont engagées à titre principal (article L.716-5 du Code de la propriété intellectuelle).
L’Ordonnance simplifie ces procédures afin d’éviter d’engager une action devant les tribunaux judiciaires compétents.
Par exception, les dispositions relatives aux nouvelles procédures administratives en déchéance et en nullité de marque sont entrées en vigueur le 1er avril 2020.
Depuis le 1er avril 2020, l’INPI est exclusivement compétent pour connaître des demandes :

  • fondées à titre principal sur un motif absolu de refus (art. L. 711-2),
  • formées sur un motif relatif lié aux signes distinctifs et territoriaux (art. L. 711-3, 1° à 5°, 9° et 10°),
  • fondées sur tous les motifs de déchéance.

Les tribunaux judiciaires conservent leur compétence exclusive pour les demandes :

  • en nullité, lorsqu’elles sont fondées sur une atteinte à un droit d’auteur, un droit sur les dessins et modèles ou un droit de la personnalité (art. L. 711-3, 6° à 8°),
  • en nullité et déchéance, lorsqu’elles sont connexes à toute autre demande relevant de leur compétence,
  • en nullité et déchéance, quand des mesures probatoires ou provisoires ou conservatoires ont été ordonnées pour faire cesser une atteinte à un droit de marques et que ces mesures sont en cours d’exécution avant une action au fond (art. L. 716-5).

Ces nouvelles actions devant l’INPI viennent compléter la procédure d’opposition et sont désormais à envisager lors de la défense d’un signe antérieur face à l’enregistrement et l’utilisation d’une marque identique ou similaire postérieure

Allègement des procédures de dépôt de marques au regard de leur représentation graphique

L’Ordonnance procède à un allègement de l’exigence de représentation graphique (article L.711-1 du Code de la propriété intellectuelle). Il suffit désormais que le signe puisse être « représenté dans le registre national des marques de manière à permettre à toute personne de déterminer précisément et clairement l’objet de la protection conférée à son titulaire ».

Cette rédaction ouvre ainsi la possibilité de déposer différents types de signes par de nouveaux moyens techniques tels que des sons ou des vidéos.

Dans le cadre du dépôt d’un nouveau type de signe, nous recommandons de déterminer avec un conseil compétent en droit des marques les modalités de représentation autorisées par l’INPI afin que ledit signe soit accepté à l’enregistrement.

Contrefaçon

Les dispositions relatives à l’action en contrefaçon relèvent désormais des articles L. 716-4 et suivants. Le Code de la propriété intellectuelle modifié élargit la liste des personnes autorisées à agir en contrefaçon. L’action peut être intentée, sans l’autorisation du titulaire de la marque, par les licenciés non exclusifs et les personnes habilitées à faire usage d’une marque collective ou de garantie. Le contrat ou le règlement d’usage peut cependant prévoir le contraire (art. L. 716-4-2). Les fins de non-recevoir sont précisées (art. L. 716-4-3 à L. 716-4-5).

Le Cabinet MVM AVOCATS vous assiste dans le dépôt et l’enregistrement de vos signes à titre de marque, notamment dans le cadre de recherches d’antériorités et de défense de droit de marques (action en opposition, action en nullité ou déchéance de marque, saisie-contrefaçon, contrefaçon de marque, concurrence déloyale).

Motifs de refus à enregistrement

L’Ordonnance procède à un élargissement des motifs de refus à l’enregistrement d’une marque (article L.711-2 du Code de la propriété intellectuelle). Ainsi, les indications géographiques, les appellations d’origine ou les marques consistant en la dénomination d’une variété végétale antérieure ne peuvent être valablement enregistrées.

Nous recommandons d’effectuer une recherche permettant d’identifier les signes antérieurs mentionnés ci-dessus pouvant empêcher l’enregistrement d’une marque, et ce avant tout dépôt de marque